Adrien Aumont — Après les fêtes de fin d’année, la plupart des gens ont mal au foie et de bonnes résolutions à la bouche. Les plus chanceux rentrent même chez eux avec des tonnes de cadeaux allant du génial à l’inutile. De notre côté, les choses sont différentes. Nous n’avons la tête qu’aux éventuelles réponses à notre nouveau roadshow. C’est le seul présent que nous aurions vraiment envie de recevoir cette année. Cela pourrait sembler un peu indélicat pour nos familles et nos proches mais, rassurez-vous, elles ne le prennent pas mal. Elles savent à quel point ce projet nous tient à cœur. Tous ceux parmi vous qui ont une âme d’entrepreneur comprennent ce dont nous parlons.
D’ailleurs, le père Noël a reçu notre lettre. Mais il ne nous a pas apporté ce que nous nous attendions à recevoir. Et pour cause, un matin de janvier, la banque d’affaires nous appelle et nous annonce que nous avons deux réponses. Deux géants sont intéressés par l’idée d’investir dans Midnight Trains. Mais pas des fonds d’infrastructures. D’abord, un géant mondial de l’hôtellerie. Ensuite, un groupe tentaculaire dont le nom est présent sur des produits extrêmement variés. C’est donc du lourd. Du très très lourd même. Le genre d’entreprises que tout le monde connaît. La surprise est grande mais nous comprenons tout de suite que nous avons un gros coup à jouer. Et nous sommes déterminés à financer Midnight Trains, avec ou sans fonds d’infrastructures.
Romain Payet — Il est temps de faire un petit rappel. Nous en avons parlé dans l’épisode précédent mais notre dernier roadshow ne s’adresse pas uniquement aux fonds d’infrastructures. Nous avons également ciblé ce qu’on appelle des acteurs stratégiques. Soit des entreprises identifiées par la banque d’affaires comme ayant une chance d’être intéressées par le projet à financer. Elle s’appuie pour cela sur sa connaissance des ces entreprises, de leurs stratégies à court et moyen termes, de leur appétence pour certains secteurs. Bref, des informations de marché. En ce qui concerne ces deux premiers retours, les choses sont claires. Le grand groupe hôtelier comme la grande marque multisectorielle ont des intérêts marqués pour le ferroviaire. Très différents mais très forts.
Nicolas Bargelès — Dès l’arrivée de ces marques d’intérêt, nous tombons tous les trois d’accord sur une chose : notre cœur penche du côté de l’hôtelier. L’autre groupe sera un plan B ou un plan C si le reste ne fonctionne pas. Le montant que ce dernier envisage d’investir est plus faible et il tente de nous attirer sur un marché que nous avons déjà éliminé de notre liste. Nous le laissons donc venir à nous. Il faut savoir ménager ses arrières et ne pas se jeter sur toutes les bonnes nouvelles.
Dès les premiers rendez-vous avec le groupe hôtelier, notre sentiment se confirme. Il apparaît rapidement que nous avons d’évidentes synergies sur l’hospitalité et sur la distribution. Mieux encore, nous réalisons que nos interlocuteurs ont préalablement évalué le secteur et le marché français, et savent de quoi ils parlent. Ils ont creusé le sujet du ferroviaire, de l’ouverture du marché, et posent des questions fines. Ils nous présentent même certaines des barrières qu’ils ont identifiées et nous demandent comment nous pensons les faire sauter ou les contourner. Le dialogue est nourri : c’est clair, nous avons changé d’univers. Nous réalisons la finesse de la sélection faite par la banque d’affaires pour ce roadshow et nous prenons un immense plaisir dans ces échanges. Il nous semble même qu’il y aurait peut-être un accord industriel de grande ampleur à trouver avec ce groupe hôtelier. C’est vous dire l’excitation qui s’empare de nous.
Adrien Aumont — Le seul souci avec les profondes synergies qu’évoque Nicolas, c’est qu’elles mènent parfois à des mariages un peu rapides. Et pour cause, nous atteignons au fil des rendez-vous un moment où tout le monde semble convaincu que tout cela va se faire. Au point que le sujet du nom de la marque arrive sur la table. Sauf qu’en face de nous, les représentants du géant de l’hôtellerie ne s’imaginent pas tellement garder le nom de Midnight Trains. Ils veulent plutôt franchiser : donner à nos trains le nom d’une de leurs chaînes d’hôtels.
Il nous semble cependant que notre projet est spécifique ! Il lui faut donc un nom qui le soit tout autant. D’autant plus que le montant que le groupe hôtelier compte apporter ne suffit pas à boucler notre financement et ne justifie donc pas de changer de nom. Heureusement, il y a un troisième géant qui a fait connaître son intérêt pour Midnight Trains. Et grâce à lui, nous pourrions former l’équipe parfaite.