Au cours des précédentes éditions de Midnight Weekly, vous avez eu le loisir de faire la connaissance de plusieurs membres de l’équipage de Midnight Trains. Alors que 2022 sera une année charnière pour notre compagnie d’hôtels sur rails, il nous était impossible de la commencer sans vous présenter les deux talents qui supervisent la conception et l’aménagement intérieurs de nos trains. Ce duo inspiré, c’est celui que composent Julien d’Hoker et Patricia Bastard, dirigeants de l’agence de design Yellow Window, implantée en France, en Belgique et aux Pays-Bas.
C’est en juillet 2020 que tous deux nous ont rejoint. Souvenez-vous, à l’époque, le monde émerge du premier confinement, et comme à nombre d’entre nous, cette épreuve a donné envie à Patricia Bastard de quitter Paris pour se mettre au vert, à Fontainebleau. Elle est dans son nouveau chez soi quand son téléphone sonne. C’est Adrien Aumont, un de nos deux cofondateurs, qui l’appelle. L’aventure de Midnight Trains est déjà sur les rails, même si à ce moment-là, peu nombreux sont celles et ceux à se douter que ce projet a germé dans nos esprits.
Adrien est à la recherche d’une équipe spécialisée dans le design des transports, il joue cartes sur table avec Patricia, qui est tout de suite séduite par l’audace du projet. Sans perdre de temps, elle en parle avec Julien d’Hoker. Au sein de Yellow Window, tous deux ont davantage l’habitude de travailler pour des grands comptes comme Thalys, Eurostar, Air France ou encore la SNCF. Jamais une start-up industrielle ne s’était présentée à eux avec rien de moins que l’ambition de réinventer la mythologie des transports. Le culot de l’entreprise les interpelle.
A la suite de ce premier échange, vont succéder les premières réunions de travail caractérisées par le vent de fraîcheur que cette mission apporte à Julien et Patricia, tant Adrien comme Romain Payet sont animés par l’ambition qui les habitent. La situation a quelque chose de profondément inhabituel : en temps normal, il incombe à Patricia et Julien de faire rêver leurs clients avec leurs propositions et pour la première fois, ils se retrouvent parfois à devoir réfréner l’enthousiasme puissant d’Adrien et de Romain. Cette aventure humaine qui commence hors des sentiers battus, a quelque chose de vivifiant.
Designer un train n’est pas anodin, comme nous vous l’avons raconté récemment. C’est là quelque chose de primordial, qui va au-delà de la stylistique, tant il permet de vivre un objet, un espace. Dans le cas de Midnight Trains, “on ne va pas designer un train, mais un train-hôtel”, rappelle Julien. “Il s’agit pour nous d’emmener les passagers à bord d’une aventure et notre mission consiste à designer le service, l’atmosphère, l’ambiance.Tout ce qui va activer chacun des sens du voyageur”.
Le premier d’entre eux est le toucher tant l’aspect tactile est essentiel pour favoriser une expérience palpable et authentique. Du point de vue de l'ouïe, tout doit tendre vers une ambiance silencieuse, protectrice. L’olfactif ne doit jamais être en reste, avec des odeurs rassurantes, qui vont aider à bercer les passagers. Autant de considérations précieuses pour créer les conditions d’une parenthèse nocturne exceptionnelle, et néanmoins sources de bien des défis.
Car à bien y regarder, à la base, “un train est contraint par ses dimensions, c’est un couloir, qui a par exemple été délaissé dans les TGV, et transformer un couloir en un hôtel, c’est un challenge”, souligne Patricia. Ça tombe bien, l’équipe de Yellow Window n’aime rien tant que ce type de terrains de jeu où leur créativité vient dépasser les gageures pour parvenir à créer une émotion.
Et pour concurrencer le secteur aérien, Midnight Trains pourra notamment s’appuyer sur une de leurs expériences passées, quand Yellow Window a réinventé La Première, ces petites suites embarquées à bord des avions d’Air France pour ses longs-courriers. L’enjeu n’était pas moins de taille, tant ils devaient composer avec un espace extrêmement exigu, tout en garantissant à chaque passager de se sentir dans sa bulle.
Julien et Patricia sont portés par la dimension onirique qui va de pair avec le train de nuit, tant il oublie cette obligation de vitesse à laquelle se sont condamnés progressivement tous les autres modes de transport ferroviaire. Si le train de nuit s’inscrit en faux par rapport à cette vision, Midnight Trains va le sublimer car l’expérience à bord “propose d’accélérer la qualité de vie tout en ralentissant l’impact écologique”, pointe Julien.
“Si je dois me lever à 3h du matin pour aller prendre l’avion, que j’attends à l’aéroport dans de mauvaises conditions, et qu’ensuite à bord, l’avion fait du bruit et pollue, quand je rentre chez moi, le soir après mon vol retour, je suis crevé, je n’ai même pas envie de dîner. En partant la veille, en regardant le paysage, en dînant à bord, j’arriverai frais, et j’aurai envie de jouer avec mes enfants en rentrant. En tant que designers, notre rôle, c’est de contribuer à cette expérience”, conclue-t-il.
Chacun d’eux garde des souvenirs différents en matière de train de nuit. Pour Patricia, c’est un voyage idyllique à bord d’un Paris-Venise, une nuit de Saint-Sylvestre en dehors du temps, avant d’arriver au petit matin face au Grand Canal. Dans le cas de Julien, c’est une nuit en direction de Wolfsburg qu’il n’est pas prêt d’oublier alors qu’il était jeune designer : il avait eu la bonne idée de chercher le sommeil en lisant les Histoires à ne pas lire la nuit d’Alfred Hitchcock. Le sommeil ne vint jamais. Ce sera assurément différent, la prochaine fois à bord de Midnight Trains : Julien rêve d’emprunter nos trains pour aller à Milan ou à Rome en famille, quand Patricia penche davantage pour Vienne.