Voici le dernier épisode de notre série qui lève le rideau sur les coulisses de l’acquisition de trains, prélude essentiel à la création d’une compagnie ferroviaire. Pour vous familiariser avec le sujet, les précédentes éditions de Midnight Weekly vous ont successivement expliqué les avantages qu’il y avait à privilégier du matériel d’occasion ou du matériel neuf. Et quelque soit ce qui emporte votre préférence en la matière, on en vient à présent à ce qui est bel et bien le nerf (du renouveau) des chemins de fer : le financement. Et quand on est un nouvel entrant dans le secteur ferroviaire, deux possibilités s’offrent à soi.
La première consiste à assurer le financement de l’achat de ses trains en propre. En somme, l’opérateur achète directement l’actif et en devient propriétaire. Ce mode de financement demande des capitaux conséquents que les nouveaux opérateurs n’ont pas toujours au moment de leur démarrage. En général, seuls les opérateurs établis, avec un historique solide et un accès facilité aux capitaux, peuvent envisager cette option.
Compte tenu de cette réalité, nombre de nouveaux entrants vont donc opter pour la seconde option répondant au nom de leasing. Ce mode de financement consiste à louer du matériel (neuf ou d’occasion, vous suivez?) préalablement acquis par un acteur spécialisé dans l’acquisition de matériel roulant ferroviaire. Ces acteurs se caractérisent par leur acronyme souvent méconnu de celles et ceux qui préfèrent le train : les ROSCOs (aka les Rolling Stock Companies).
Ce schéma présente bien des avantages : l’opérateur en devenir n’a en effet pas à débourser les sommes nécessaires à l’acquisition, à la rénovation et au réaménagement du matériel (dans le cas du matériel d’occasion) ou à la production du matériel (dans le cas du neuf). C’est la ROSCO qui assurera le paiement de ces sommes, deviendra propriétaire du matériel et mettra en place un contrat de location avec l’opérateur concerné spécifiant notamment le montant du loyer mensuel et la durée de la location.
Dans ce cas de figure, la ROSCO va procéder à une analyse préalable du matériel roulant à acquérir, en prenant en considération plusieurs éléments clés : la qualité du matériel, le coût d’acquisition ou de production, la solidité du constructeur ou de l’atelier de rénovation, et enfin, les possibilités de le louer à un autre opérateur ferroviaire si le loueur initial ne pourrait plus payer les loyers. Rien n’est laissé au hasard.
Ce n’est pas là la seule chose qui est mesurée par la ROSCO à l’heure de se lancer dans cette opération. Un autre point essentiel, et qui n’est pas forcément intuitif pour les moins passionnés de finances parmi nous, sera la durée de vie de l’actif. Cet élément peut avoir un impact significatif pour la ROSCO et par effet miroir, sur le montant des loyers.
Prenons un exemple de manière simplifiée, de sorte à en faciliter la compréhension. Toutes choses étant égales par ailleurs, un matériel qui coûterait 10 et serait amorti sur dix ans, coûterait plus cher en loyers qu’un matériel en coûtant 20 et amorti sur quarante ans. C’est la raison pour laquelle même si le matériel d’occasion peut s’avérer moins cher à l’acquisition que le matériel neuf, le loyer afférent pour l’opérateur peut au final s’avérer plus onéreux.
En conclusion de ce dernier épisode, le leasing est donc l’option de financement qui semble la plus appropriée pour un nouvel opérateur n’ayant pas forcément les moyens d’acquérir son matériel en propre. Pour autant, sur la durée de vie de l’actif, cette solution sera forcément plus onéreuse que l’acquisition en propre, car la ROSCO prenant un risque, elle ne manque pas de le rémunérer. Point également essentiel à prendre en compte, il faut intégrer la durée de fin estimée de l’actif lors de l’arbitrage entre matériel neuf ou d’occasion, car elle peut avoir un impact important sur le montant du loyer.
Le mode d’emploi que nous venons de dresser en trois épisodes vous aura, nous l’espérons, familiarisés avec les enjeux des décisions à venir pour Midnight Trains. A l’heure où le train vit un retour en grâce chez nombre de voyageurs, il nous semble essentiel de vous donner à voir en toute transparence, ce qui préside à son succès durable. Au cours des prochaines éditions de Midnight Weekly, nous aurons l’occasion de vous raconter ce que nous déciderons de faire, avec Midnight Trains !
NB : Expert.e.s du ferroviaire, ces explications sont données dans les grandes lignes et bien d’autres éléments sont évidemment susceptibles d’entrer en ligne de compte.