Vous nous l’avez demandé : c’est le grand retour de notre série sur les coulisses du lancement de Midnight Trains ! Dans la première saison, nous avons levé le rideau sur tout ce qui rend possible l’achat d’un train. Si vous l’avez ratée, les épisodes sont disponibles ici, là ou encore à cet endroit.
En vérité, nous avions sauté quelques étapes. C’est pourquoi à compter de cette semaine, nous avons décidé de revenir avec une nouvelle saison de cinq épisodes, pour tout vous raconter sur comment l’on s’y prend pour designer un train (et plus encore, comme quand dans notre cas, le design participe à réenchanter le voyage en train de nuit). C’est un peu une prélogie qu’on vous propose, façon Star Wars mais les pieds sur terre.
Avant de se lancer dans l’achat d’un train, nombre d’étapes liées au design sont essentielles puisqu’elles vont permettre d’analyser la compatibilité du matériel en l’état et anticiper les coûts de rénovation, dans le cas de trains d’occasion, ou de préparer le cahier des charges en vue de la consultation des constructeurs, dans le cas de trains neufs. Et point important dans notre cas, nous travaillons à la création d’hôtels sur rails : no offense pour les trains de jour, mais vous comprendrez aisément qu’on est sur une autre forme de complexité qu’une suite banale de sièges répliquée en autant de voitures que nécessaire !
Avant de pouvoir sortir des images de l’intérieur des chambres avec les matières et les couleurs, comme celles que vous pouvez trouver sur notre site, la première étape indispensable consiste donc à opérer un inventaire des espaces, autrement dit lister tous les services qui seront nécessaires et appréciés par les voyageurs.
Dans le cas de Midnight Trains, nous avons toujours pensé nos trains comme des lieux de vie nocturne mouvants, dans lesquels nos passagers pourront se restaurer, se divertir et dormir. Pourtant, lorsqu’on part d’une feuille blanche, ces trois actions ne sont pas suffisantes à définir la liste des services. Oh non. Pour l’établir de façon exhaustive, il faut s’appuyer sur différents critères :
La définition des publics de l’offre est l’étape préalable à la construction de la liste de services car elle va conditionner tout le reste. Des opérateurs vont viser prioritairement les voyageurs d’affaires comme Eurostar et Thalys, d’autres une clientèle mixte loisirs et affaires à fort pouvoir d’achat comme Italo, ou encore pour certains une clientèle loisirs low-cost comme OuiGo en France et en Espagne ou FlixTrain en Allemagne.
Chaque public va avoir des attentes de services spécifiques et des priorités liées à ses habitudes de voyage qui vont fortement conditionner la liste de services à intégrer dans le train. Un voyageur d’affaires voyage habituellement seul ou avec des personnes qui ne font pas partie de son cercle intime, et préférera dormir seul. Ce même voyageur voudra arriver aussi rasé de frais que frais comme un gardon, à son premier rendez-vous de la journée et souhaitera, selon toute vraisemblance, avoir une douche privative. Pour leur part, les voyageurs en famille partant en vacances auront assurément besoin d’espaces de stockage pour les bagages, comme de services spécifiques pour les enfants (table à langer, lit bébé,...). Fort de cette première inspection des publics de l’opérateur, une première liste de services commence à se dessiner.
Viennent ensuite s’ajouter à cela, les services caractéristiques du positionnement de l’opérateur. Certains opérateurs vont avoir un positionnement très luxe ancré dans la nostalgie du passé, comme le VSOE et son wagon bar avec un piano demi-queue (promis, on vous en parlera bientôt, c’est quelque chose), ou un positionnement très moderne, comme à nouveau Italo et ses écrans TV à chaque siège (et ça, on vous en a déjà parlé par ici).
Enfin, cette liste devra se confronter à la réalité technique du ferroviaire et économique pour les voyageurs. Pour la faire simple, un exemple très parlant : avoir un jacuzzi dans un train, peut faire rêver sur le papier, mais ça va bien évidemment poser des grosses contraintes techniques au constructeur et avoir un impact économique qui se répercutera sur le prix du billet pour les voyageurs.
Il n’y a pas de mystère : la clé réside donc toujours dans l’adéquation de l’offre avec les attentes et les priorités du public, le positionnement et les prix des services proposés par l’opérateur.
L’étape suivante (et finale, pour ce premier épisode) consiste à traduire cette liste de services en différents modules qui composeront le train : et c’est là qu’on en arrive au fameux inventaire des espaces ! En effet, un même service peut être délivré de plusieurs façons et dès lors, dans plusieurs espaces.
La restauration peut être ambulante avec des chariots (comme dans les avions), à table (comme dans un restaurant) ou en chambre (à la façon du room service d’un hôtel). De son côté, l’espace sommeil peut être un espace commun de sièges ou des chambres pour 1, 2, 4 ou 6 personnes. Les douches peuvent être communes ou privatives dans le même espace que les chambres. Enfin, le divertissement peut consister à regarder un film sur un écran dans sa chambre ou dans une salle de cinéma et de concert.
Pour étayer nos propos, prenons un exemple simple et extrême : un train de nuit avec un positionnement luxe pour les voyageurs d’affaires. Sa liste simplifiée de services serait en somme :
Et voici donc l’inventaire d’espaces qui en découlerait, pourrait être résumé par quatre modules :
Une fois les modules définis, il conviendra de les intégrer dans un espace contraint à deux égards :
Arrivé à ce stade, une nouvelle étape (et, vous l’avez compris, un nouvel épisode!) se dessine : celui qui va permettre de définir le diagramme des voitures (avec un plan 2D des espaces intérieurs pour chaque type de voiture) et la composition des trains (la somme de voitures composant le train complet). On s’arrête là pour cette semaine et on vous donne rendez-vous pour la suite de cette nouvelle saison !