Cette semaine encore, Midnight Weekly saute dans un train pour vous faire découvrir ou redécouvrir des lieux à portée de rails. Nous avons décidé de vous emmener dans un endroit où les influences de cette région se mélangent à celles du Vieux Continent : Erevan, la capitale méconnue, mais néanmoins splendide, de l’Arménie. Si, comme le reste du pays, celle-ci reste profondément marquée par le génocide commandité par le parti des “Jeunes-Turcs” entre avril 1915 et juillet 1916, il s’agit d’une ville incroyablement vivante, colorée et passionnante. Après Nantes, la Laponie suédoise et Vilnius, on file donc en direction de cette cité bouleversante.
Fondée en 782 avant J.C., Erevan a connu une histoire longue et mouvementée, qui a laissé de nombreuses marques architecturales sur la ville. A n’en pas douter, il vous faut donc absolument visiter la place de la République, la cathédrale Saint-Grégoire, la Mosquée Bleue et, bien sûr, le Tsitsernakaberd, le déchirant monument dédiée aux victimes du génocide. Mais vous n’avez pas besoin de nous pour ça. A la place, on vous emmène voir La Cascade, un gigantesque escalier traversant plusieurs jardins en terrasse, qui est l’un des symboles de la capitale. Ne commettez toutefois pas l’erreur de rester à l’extérieur. Le complexe cache en fait un centre d’arts sur quatre niveaux qui accueille des expositions d’art contemporain, trop souvent ignorées par les touristes.
On file ensuite vers le Matenadaran, dont le nom est une contraction de deux mots arméniens pouvant se traduire par parchemin et dépôt. Construite en 1959 par le gouvernement soviétique du pays, cette forteresse a pour objectif de protéger les 23 000 manuscrits et les 500 000 documents d'archives qu’elle contient. Parmi eux se trouvent certaines pièces rarissimes comme un évangile arménien complet du VIIe siècle ainsi que des textes introuvables ailleurs, en grec ou encore en éthiopien. Un voyage dans le temps qui fascinera tous les passionnés de mystères et de raretés littéraires. A ne rater sous aucun prétexte tant l’ambiance des lieux est troublante.
Après ces deux grands shots de culture, on s’installe pour déjeuner à l’une des tables de Dolmama, pour se plonger dans la gastronomie arménienne. Bien connu des locaux, ce restaurant au personnel délicieux accueille ses hôtes dans une décoration rétro et confortable. L’établissement propose probablement les meilleurs plats traditionnels de la ville à commencer par une version du dolma, la feuille de vigne, où la viande hachée est remplacée par de l’aloyau auquel est ajoutée une touche de chili et de romarin. Une véritable merveille qui mérite à elle seule le déplacement. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut passer à côté du khashlama, un excellent ragoût de viande et de pommes de terre agrémenté, ici, de vin et de crème fraîche. Vous en ressortirez convaincus.
On prend maintenant la direction du quartier de Kond, le plus ancien d’Erevan, qui est visuellement très en décalage avec le reste de la ville. Constituée de vieux bâtiments parfois en ruines, la zone est toujours habitée. Elle est aussi un lieu d’expression artistique où la créativité habite une grande partie des murs. Des fresques, parfois petites et parfois très grandes, recouvrent ainsi de nombreux murs de Kond. Une fois que vous avez fini votre balade, n’oubliez pas de prendre le tunnel datant de l’ère soviétique, lui aussi rempli de street art, qui vous conduira à proximité de la hrazdan gorge où se trouve notamment “The Children’s Railway” dont le nom parle de lui-même. Evidemment, c’est parfait pour les passionnés de train qui voyagent en famille.
Si Erevan contient encore beaucoup de merveilles, on vous propose maintenant de sortir de la ville pour rejoindre le Lac Sevan, à un peu moins d’une heure du centre. Situé à 1 950 mètres de haut et mesurant 74 kilomètres de large, c’est une véritable mer intérieure cachée dans le Caucase. Décrit par l’écrivain russe Maxime Gorki comme un morceau de ciel bleu tombé parmi les montagnes, le lac n’a jamais laissé aucun visiteur indifférent. C’est d’autant plus vrai que rares sont les touristes à venir jusqu’à lui. Ce qui ne fera que renforcer la puissance de votre expérience dans cet endroit complètement hors du temps, où toutes les considérations humaines semblent lointaines.
On rentre à Erevan pour finir notre week-end arménien en beauté, en descendant les quelques marches d’un bâtiment du centre puis en pénétrant dans son sous-sol. C’est là que se cache le restaurant The Club. Si son nom n’a pas grand-chose de local, c’est pourtant l’un des porte-étendards de la nouvelle cuisine arménienne. Dans une salle aux murs de pierres et aux grandes poutres apparentes, la jeune équipe de l’établissement a réussi à créer une atmosphère chaleureuse et intimiste où se presse une partie de la scène intellectuelle de la ville. Ne vous y trompez pas, l’ambiance n’a rien de snob ni d’exclusive. Au contraire, on n'a jamais envie d’en partir. Surtout après avoir goûté les plats délicats où la cuisine arménienne est revisitée à l’aune de la gastronomie internationale. Un endroit comme on les aime, où on se sent comme chez soi même si on est loin de la maison.