Saison 5 - La création de la marque

Épisode 2 - Se lancer ou rester discret ?

Adrien Aumont — Dans un premier temps, le logo et l’identité visuelle créés par Yorgo Tloupas restent secrets. Ils servent essentiellement à créer des decks pour des investisseurs potentiels. Rares sont nos interlocuteurs qui les voient. Mais après quelques mois, une question stratégique nous apparaît : devons-nous rester sous les radars jusqu’au moment où nous aurons fait construire nos trains ? Voire jusqu’au moment où nous serons prêts à lancer notre billetterie ? Ou, au contraire, devons-nous commencer à installer la marque auprès du grand public et à créer une communauté ?

La question est à ce point importante qu’elle remonte jusqu’à notre board stratégique qui, dans un premier temps, n’est pas très chaud pour cette sortie du bois. Il faut dire qu’il y a des risques. Nous sommes en 2021 et nous savons que nous ne commencerons pas à vendre des billets avant longtemps. Il existe donc un risque qu’il n’y ait pas d’éléments assez concrets pour que les gens et la presse accrochent, qu’ils aient envie de s’intéresser à notre histoire. De plus, il faut réussir à construire un narratif qui soit compatible avec un éventuel retard dans le lancement de nos trains.


Romain Payet — Malgré ces risques, nous étions convaincus qu’il fallait le faire, qu’il fallait se lancer. Dans le monde ferroviaire, il faut de la crédibilité et, à ce moment-là, même si nous avons un impressionnant board stratégique, nous en manquons encore. Nous nous disons alors qu’en nous faisant connaître, en créant une communauté et en l’emmenant avec nous dans cette aventure, nous pouvons aller chercher cette crédibilité. Exister ainsi nous permettra d’être plus solides dans nos interactions avec nos partenaires, nos investisseurs, et nos constructeurs. C’est aussi un moyen de nous signaler à la concurrence, de dire à tous ceux qui voudraient lancer des trains de nuit que nous serons là aussi.


De plus, nous pensons tous les deux que créer une communauté est une bonne amorce pour vendre des billets quand nous en arriverons à notre lancement commercial. Et pour cause, nous aurons eu le temps de communiquer les bons messages à celles et ceux qui nous suivent, de leur expliquer notre vision du train de nuit et de Midnight Trains. Cela nous permettra de gagner du temps dans notre communication. D’autant plus que nous savons que nous n’aurons pas des budgets aussi importants que les géants de l’aviation ou du ferroviaire. Ensuite, nous faire connaître du grand public nous ouvrira potentiellement des opportunités d’être interviewés et invités dans différents médias, des journaux, des magazines, des émissions et des podcasts, en France et à l’étranger. Nous ne savons pas si ça va fonctionner à la hauteur de nos espérances mais ce sont les arguments avec lesquels nous finissons par convaincre notre board qu’il faut nous lancer.


Adrien Aumont — Et puis, c’est l’année du ferroviaire à la Commission européenne. Nous savons que le sujet va être récurrent dans les médias et dans les cercles politiques, ce serait trop bête de ne pas profiter de cette aspiration.


Pour ce faire, il nous faut toutefois un moyen de communiquer qui soit en lien avec notre vision de Midnight Trains. Depuis les années que j’ai passé dans la pub, je suis convaincu qu’il vaut mieux se comporter comme un média que comme une marque, qu’il faut produire des contenus riches, pertinents et divertissants. Sans quoi une marque devient vite un fantôme dont la communication est un robinet d’eau tiède, voire pire, un parasite. Surtout à une époque où nous sommes tous bombardés de contenus de marques sur les réseaux sociaux et plus généralement sur Internet.

Forts de toutes ces réflexions, nous sommes très vite séduits par l’idée d’une newsletter. C’est peu onéreux et ce n’est pas intrusif. Chacun décide de s’abonner ou pas à cette newsletter, de l’ouvrir ou pas, de la lire ou pas et de la supprimer ou pas. Cela dit, il faut proposer quelque chose de fort pour capter l’attention des lecteurs, pas se contenter d’un envoi qui contient trois articles de cinq lignes avec les liens de redirection où on découvre que les articles font en réalité sept lignes. Notre newsletter à nous doit remplir deux missions. D’une part, faire comprendre que le ferroviaire est un univers cool, passionnant et débordant d’histoires fascinantes. D’autre part, faire découvrir notre identité aux lecteurs. C’est ainsi que nous arrivons à la première version de la newsletter, avec des récits sur les petites histoires de la grande histoire du rail et une bonne dose de liens culturels permettant de comprendre l’esprit de Midnight Trains. Des recettes de chefs que nous apprécions pour que les gens puissent les faire le week-end. Des films qu’ils peuvent regarder le soir tout en comprenant ce que nous aimons. Une playlist pour qu’ils puissent nous emmener partout avec eux et se plonger dans notre univers culturel et artistique.


Enfin, il nous faut de la densité, une longue newsletter. Afin que ceux qui la lisent en entier soient captés et que ceux qui sont un peu plus en retrait soient impressionnés par le travail fourni par nos équipes. Nous voulions que ça force le respect. C’est d’ailleurs une façon de faire que avons appliquée à tous les niveaux de cette aventure, la qualité plutôt que la quantité. Dans la newsletter et dans l’ensemble de notre communication.

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